Pourquoi l'homme se trompe-t-il aussi souvent ? Quelles sont les voies qui le conduisent à croire qu'il a raison alors qu'il s'égare ? Certaines de nos erreurs sont fascinantes parce qu'elles sont récurrentes et même prévisibles, cela voudrait-il dire que nous serions parfois programmés pour l'erreur ? Ce livre se propose de répondre à ces interrogations en présentant de façon claire les recherches les plus récentes en sociologie cognitive assorties de plusieurs exemples, tragiques pour certains. L'énigme de l'erreur est obsédante pour qui veut comprendre le fonctionnement de notre vie collective car elle a de nombreuses conséquences sociales.
Pensez au contraste affligeant qui existe entre l'intelligence radieuse d'un enfant en bonne santé et la faiblesse de pensée de l'adulte moyen. Serait-il si impossible que l'éducation religieuse précisément porte une grande part de responsabilité dans cette atrophie relative ? A mon avis, il faudrait très longtemps à un enfant non influencé pour qu'il commence à se faire des idées sur Dieu et les choses au-delà de ce monde. Peut-être ces idées emprunteraient-elles alors les mêmes voies que celles qu'elles ont prises chez ses aïeux, mais on n'attend pas que ce développement ait lieu, on lui sert les doctrines religieuses à un moment où il n'a encore ni intérêt pour elles, ni la capacité d'en saisir la portée. Retarder le développement sexuel et hâter l'influence religieuse sont bien les deux points principaux du programme de la pédagogie d'aujourd'hui, n'est-ce pas ? Lorsque ensuite s'éveille la pensée de l'enfant, les doctrines religieuses sont devenues d'ores et déjà inattaquables.
Cette édition des Méditations reprend la traduction faite à partir du texte latin, publié en 1641, par le duc de Luynes et revue par Descartes avant sa première édition française en 1647. Le livre se compose de six Méditations suivies des Réponses aux objections. Ces dernières avaient été sollicitées par Descartes « pour faire que tout ce en quoi le lecteur pourrait trouver de la difficulté, se trouve éclairci par mes réponses.» (Lettre à Mersenne, 21 janvier 1641).
" pour un prince, donc, il n'est pas nécessaire d'avoir toutes les qualités susdites, mais il est tout à fait nécessaire de paraître les avoir.
J'oserai même dire ceci : si on les a et qu'on les observe toujours, elles seront néfastes ; si on paraît les avoir, elles sont utiles. ".
Le sexe désigne communément le sexe biologique qui nous est assigné à la naissance (mâle ou femelle), le rôle ou le comportement sexuels qui sont censés lui correspondre (le genre) et, enfin, la sexualité. Les théories féministes s'attachent à la problématisation de ces trois acceptions mêlées du sexe. Elles travaillent à la fois sur les distinctions historiquement établies entre le sexe, le genre et la sexualité, sur leurs constructions et leurs relations. S'agit-il d'une relation de causalité : le sexe biologique détermine-t-il le genre et la sexualité ? D'une relation de simultanéité non contraignante entre le sexe biologique, d'une part, et l'identité sexuelle (de genre et de sexualité), d'autre part ? S'agit-il d'une relation de normalisation ? L'hétérosexualité reproductrice est-elle la norme légale, sociale, mais aussi médicale, à l'aune de laquelle les catégories de sexe comme de genre peuvent être déconstruites, voire contestées et bouleversées ?
Le présent volume porte sur les théories féministes de ces cinquante dernières années, dont la richesse et l'engagement font l'un des champs les plus novateurs de la recherche actuelle : le féminisme marxiste, l'épistémologie ou l'éthique féministes, l'histoire et la philosophie féministes des sciences, le black feminism, le féminisme « post-moderne » et la théorie queer. L'ensemble de ces pensées constitue aujourd'hui un véritable champ de la philosophie contemporaine, dont on trouvera ici une introduction et une problématisation particulièrement éclairantes.
Le 21 décembre 1914, Freud écrit qu'il prépare « une théorie de la névrose avec des chapitres sur les destins de pulsions, le refoulement et l'inconscient ». Il commence en mars 1915 à composer ces trois essais qu'il présente, dans la lettre du 1er avril à Lou Andreas-Salomé, comme « une sorte de synthèse psychologique de ses conceptions antérieures ».
La Poétique de l'espace explore, à travers les images littéraires, la dimension imaginaire de notre relation à l'espace, en se focalisant sur les espaces du bonheur intime. Le « philosophe-poète » que fût Gaston Bachelard entend ainsi aider ses lecteurs à mieux habiter le monde, grâce aux puissances de l'imagination et, plus précisément, de la rêverie. Aussi l'ouvrage propose-t-il tout d'abord une suite de variations poético-philosophiques sur le thème fondamental de la Maison, de celle de l'être humain aux « maisons animales » comme la coquille ou le nid, en passant par ces « maisons des choses » que sont les tiroirs, les armoires et les coffres.
Il ouvre de la sorte une ample réflexion sur l'art d'habiter le monde, impliquant une dialectique de la miniature et de l'immensité, puis du dedans et du dehors, qui s'achève par une méditation des images de la plénitude heureuse, condensant les enjeux anthropologiques, métaphysiques et éthiques de cette oeuvre sans précédent.
L'interprétation du rêve introduit à la fois une nouvelle méthode et une nouvelle théorie. La méthode est celle de l'analyse et des associations ; elle décompose le contenu de rêve manifeste en autant d'éléments ou constituants du rêve pour retrouver, en suivant les cheminements de pensée du rêveur, les pensées de rêve latentes. " L'interprétation des rêves est la voie royale qui mène à la connaissance de l'inconscient de la vie psychique. " (S. Freud) Direction scientifique : Jean Laplanche. Direction de la publication : Pierre Cotet. Notices, notes et variantes par Alain Rauzy. Traduit par Janine Altounian, Pierre Cotet, René Lainé, Alain Rauzy, François Robert. Préface de François Robert.
"L'un des plus grands livres de sagesse qui soit" L'édition des Essais par Pierre Villey parue en 1924 en trois volumes, était devenue introuvable elle fut reprise par V. L. Saulnier en 1965, dont la préface explique le choix de P. Villey de l'édition de Bordeaux et le travail minutieux réalisé.
Le travail de Pierre Villey est fondé sur l'édition de Bordeaux en 1588 (2e éd des Essais) enrichie des commentaires manuscrits de Montaigne. Une troisième édition est parue en 1595 après la mort de Montaigne à partir des ultimes notes de Montaigne recueillies par P. de Brach et M. de Gournay qui a longtemps passée comme étant la "version officielle et définitive". Mais l'exemplaire dit de Bordeaux reste la version la plus "authentique" dans la mesure où elle comporte les commentaires manuscrits de Montaigne et corrections pour une "sixième édition" destinée à l'imprimeur.
Cette nouvelle présentation dans la collection Quadrige en un seul volume reste toujours fidèle à l'édition originale. Elle est enrichie d'une préface de Marcel Conche.
« Philosopher, c'est penser sa vie et vivre sa pensée. Entre les deux, un décalage subsiste pourtant, qui nous constitue et nous déchire. A quoi bon tant penser si c'est pour vivre si peu ? On voudrait ici essayer autre chose : une philosophie à découvert, au plus près de la vie réelle, de ses échecs, de sa fragilité, de sa perpétuelle et fugitive improvisation. C'est ce que le mot d'impromptus, emprunté à Schubert, a paru pouvoir désigner à peu près. »
À travers l'étude du sacrifice, Hubert et Mauss s'intéressent au sacré et au rapport au sacré, dont l'étude ouvre une fenêtre sur la nature de la société puisque les choses sacrées sont choses sociales. À partir de l'idée de l'unité générique du sacrifice qui repose sur le postulat de l'unité du genre humain, la démarche suppose de s'intéresser à toutes les formes de sacrifices rituels pour en tirer le schème général ou type idéal. Ce parti pris méthodologique comparatiste, issu de l'école durkheimienne, fait toute l'originalité de l'essai à son époque et sa pertinence de nos jours, évitant les spéculations généalogiques qui établiraient l'antériorité d'une forme sur une autre. Ce texte classique permet de formuler une série de questions toujours actuelles pour l'ethnographie.
Contrairement à ce que le titre a souvent pu laisser penser, il ne s'agit pas d'un livre sur les enfants surdoués. On y trouvera par contre une recherche autour de l'interrogation : pourquoi tant d'adultes doués, qui réussissent dans la vie, souffrent-ils de se sentir étrangers à eux-mêmes, intérieurement vides ? Depuis la première parution de ce livre en 1979, les réponses d'Alice Miller à cette question ont aidé de nombreux lecteurs à trouver un accès à leur propre histoire et à découvrir que la partie précieuse de leur Soi leur était restée cachée jusqu'alors (leur " drame ").
Ses lecteurs sont encouragés à chercher les raisons de leur souffrance actuelle dans leur histoire, l'histoire du petit enfant qui ne devait vivre que pour les besoins de ses parents en ignorant ou niant ses propres besoins. Au lieu de payer plus tard avec des dépressions et de nombreuses maladies corporelles pour cette auto-mutilation, l'adulte peut s'en libérer en trouvant l'empathie pour l'enfant qu'il a été et pour sa souffrance muette. Aussitôt qu'il assume sa vérité, bloquée si longtemps dans son corps, il peut commencer à regagner, pas à pas, sa vitalité, la vie authentique qu'il n'avait pas osé vivre.
La perception par l'auteur du vécu réel de l'enfant n'est plus en lien avec celle de la psychanalyse, à laquelle Alice Miller reproche de rester dans la vieille tradition qui accuse les enfants et protège les parents, autant dans la théorie que dans la pratique où les rapports des traumatismes réels sont interprétés comme fantasmes.
« J'aime les définitions. J'y vois davantage qu'un jeu ou qu'un exercice intellectuel?: une exigence de la pensée. Pour ne pas se perdre dans la forêt des mots et des idées. Pour trouver son chemin, toujours singulier, vers l'universel.
La philosophie a son vocabulaire propre?: certains mots qui n'appartiennent qu'à elle, d'autres, plus nombreux, qu'elle emprunte au langage ordinaire, auxquels elle donne un sens plus précis ou plus profond. Cela fait une partie de sa difficulté comme de sa force. Un jargon?? Seulement pour ceux qui ne le connaissent pas ou qui s'en servent mal. Voltaire, à qui j'emprunte mon titre, a su montrer que la clarté, contre la folie des hommes, était plus efficace qu'un discours sibyllin ou abscons. Comment combattre l'obscurantisme par l'obscurité?? La peur, par le terrorisme?? La bêtise, par le snobisme?? Mieux vaut s'adresser à tous, pour aider chacun à penser. La philosophie n'appartient à personne. Qu'elle demande des efforts, du travail, de la réflexion, c'est une évidence. Mais elle ne vaut que par le plaisir qu'elle offre?: celui de penser mieux, pour vivre mieux. C'est à quoi ces 2 267 définitions voudraient contribuer. »
Faire de la sociologie une science, tel était le souhait de Durkheim lorsqu'il publie en 1894 cet ouvrage dans la Revue philosophique. Appliquant le rationalisme scientifique aux phénomènes sociaux, la sociologie a pour vocation d'établir des lois de la vie sociale comme il existe des lois de la nature. Dans une introduction, François Dubet explique l'argument de Durkheim, ses lignes de force mais aussi les quelques aspects plus critiquables, plus d'un siècle après la publication du livre.
Cet ouvrage est la thèse de doctorat en médecine présentée en 1943 par Georges Canguilhem, augmentée, lors de sa réédition vingt ans plus tard, de réflexions philosophiques sur la signification du terme « normal » en médecine. La thèse débute par une étude historique sur l'identité des phénomènes normaux et pathologiques, dogme de la pensée médicale au XIXe siècle. La seconde partie est une étude systématique, sous la forme d'une analyse critique, des concepts de normal et de pathologique.
Georges Canguilhem (1904-1995), philosophe puis médecin, contribua à rénover l'épistémologie française.
"Exister dans le système, c'est souvent être assis derrière des vitres, face à un écran." Des forces nouvelles, mixtes de technique, d'économique et de numérique, ont fait leur apparition. D'une puissance hors norme, ces ultraforces modifient nos systèmes et les fragilisent, produisant le rejet du système, quand ce n'est pas la maladie ou la misère. Ce qui émerge alors est une surenchère entre un système fragilisé et des ultraforces décomplexées. Nous assistons à ses premiers effets : simplisme politique, approfondissement des inégalités, règne de multinationales dominant les États.
Face à ces questions, le livre propose une philosophie concrète du système (centrée sur le verre, les chaises et les écrans) et des ultraforces qui en dessinent le cours. Il ouvre la voie à la construction d'un soi plus authentique, moins déterminé par ce qui l'entoure. Comment être soi à l'ère des ultraforces, avec leur cortège de simplicité et de brutalité ?
Penser le temps peut aider à mieux vivre, à condition de se défaire des métaphores qui assimilent la durée à un flux ininterrompu ou à une continuité mélodique. Contre Bergson, Bachelard soutient que la durée, loin d'être un tissu indéchirable, une enveloppe qui nous berce ou qui nous porte, a un caractère essentiellement composite. Elle se forme sur la base discontinue des actes de l'esprit. Pour vérifier cette thèse, Bachelard aborde tour à tour la psychologie de la mémoire et de l'action volontaire, les formes de la causalité en physique, l'observation des phénomènes quantiques, l'esthétique musicale et poétique, les compositions temporelles du sentiment, de la pensée abstraite et de la vie morale. Il en dégage cette leçon générale : durer, c'est ordonner de loin en loin des instants actifs ; c'est composer des rythmes. L'approfondissement métaphysique de cette idée conduit Bachelard à dégager ce qu'il tient pour le noyau « dialectique » de l'expérience temporelle, et plus généralement de la vie de l'esprit : l'oscillation entre activité et repos, être et néant. Le projet de « rythmanalyse » sur lequel débouche cette étonnante enquête suggère que le secret philosophique du repos est dans une existence bien rythmée. De nombreuses applications permettent d'en vérifier l'idée : de l'homéopathie à la chronobiologie, en passant par le travail poétique des ambivalences sentimentales ou l'analyse de « l'état lyrique ». Accompagnée d'une présentation, de notes explicatives, d'une table analytique, d'un index et d'une bibliographie, cette édition permettra à chacun de prendre la mesure de l'originalité et de l'audace d'un essai de philosophie expérimentale qui n'a rien perdu de son actualité depuis sa première publication en 1936.
L'ambition n'était pas de clore le débat par une étude exhaustive mais de le relancer [...]. J'ai tenté de retracer les grandes lignes d'une évolution qui, de la royauté mycénienne à la cité démocratique, a marqué le déclin du mythe et l'avènement de savoirs rationnels. En quoi consiste le miracle grec ? Quelles sont les innovations ayant marqué ce que nous appelons la pensée grecque et pourquoi se sont-elles produites dans ce monde grec ? Le mérite de Jean-Pierre Vernant est de réaliser une synthèse personnelle et accessible sur un sujet controversé où s'affrontent de nombreux hellénistes.
Publié en 1962 dans la collection « Mythes et religions », dirigée par Georges Dumézil, l'auteur a lui-même, à l'occasion d'une réédition parue vingt-cinq ans plus tard, réactualisé dans une longue préface certaines de ses interprétations.
L'ouvrage aborde la crise constitutive de notre époque, comprise comme accomplissement de l'histoire occidentale de la rationalité. La logique propre à cette histoire est restituée à partir de Hegel, qui permet de voir dans l'histoire un processus de totalisation achevée dans la « totalité autonome » de l'État, régie par la terreur et la guerre. Cette figure de l'État correspond au concept classique, depuis les années 1920, de totalitarisme, c'est pourquoi il importe de les étudier : mais les totalitarismes ne sont ici abordés que comme phénomènes, seconds et dérivés, d'un processus de totalisation dont il faut exhiber le mode de déploiement. D'où une relecture de Tocqueville, qui montre que le processus de totalisation politique repose sur l'avènement du pouvoir total de la masse, puis une relecture de Marx, qui découvre dans le capitalisme un processus de totalisation immanent au champ des pratiques, lequel fonde le processus social étudié par Tocqueville. Le cheminement de l'ouvrage est ainsi généalogique, et reconduit de la totalité étatique à sa base sociale, puis à son fondement pratique : la dernière étape consiste alors à mettre en évidence que la question de la technique est plus fondamentale encore que celle du capitalisme, en mettant au jour, avec Heidegger et Günther Anders, un « totalitarisme technocratique ». Son enjeu consiste ainsi à articuler l'État, la démocratie, le capitalisme et la technique comme catégories fondamentales de la totalisation (dite « mondialisation ») contemporaine, en même temps que mettre au jour leur provenance spécifiquement occidentale.