On lit souvent Montaigne comme une sorte de contemporain, déjà moderne par-delà les siècles. Chacun s'y projette à son aise. Mais qu'est-ce au juste que la modernité de Montaigne ? Rien de moins, peut-être, que l'invention de la modernité, c'est-à-dire d'une manière d'être soi et de se peindre dans son temps - parfois pour fuir les vicissitudes du monde en se réfugiant dans l'écriture de soi qui donne naissance à l'intériorité moderne. C'est ce que suggère Philippe Desan dans ce nouveau livre, dernier volet d'une trilogie qui a changé notre regard sur un écrivain qui paraît si familier qu'on cède facilement à la légende qu'il a lui-même forgée dans ses Essais.
Montaigne est l'«?un des premiers auteurs à assumer une subjectivité qui, l'écriture aidant, devint le principal objet de son livre?» (P. Desan). Il est ici mis à l'épreuve d'une lecture exigeante, qui examine ce que Montaigne dit de lui à la lumière de ce qu'il ne dit pas, met en balance le soi et le monde que les Essais donnent à voir avec ce qu'on peut en savoir par ailleurs - du point de vue politique, social, idéologique, esthétique, etc. Le but n'est pas de juger, mais de saisir Montaigne au plus près, paradoxalement, en prenant de la distance - assez pour voir ensemble à la fois l'homme et son temps, et leur représentation dans les Essais.
Un ouvrage de référence, qui renouvelle la lecture de Montaigne et de sa modernité avec les outils de la nôtre, qu'il a contribué à faire advenir.
Etre rationnel, ce n'est pas se couper de ses émotions.
Le cerveau qui pense, qui calcule, qui décide n'est pas autre chose que celui qui rit, qui pleure, qui aime, qui éprouve du plaisir et du déplaisir. Le coeur a ses raisons que la raison... est loin d'ignorer. Contre le dualisme du corps et de l'âme, mais aussi contre ceux qui voudraient réduire le fonctionnement de l'esprit humain à de froids calculs dignes d'une machine, voilà ce que révèlent les acquis récents de la neurologie.
Un ouvrage déjà classique, par l'un des plus grands spécialistes et théoriciens mondiaux du cerveau.
Voici le dernier livre de Jean-Claude Carrière, rédigé quelques mois avant sa mort.
Questionnement sur le monde à venir, par un homme qui s'apprête à le quitter, l'ayant intensément connu et parcouru et qui a passionnément aimé la vie.
Il est question de l'humanité, du bruit très doux de l'âme, de ce à quoi nous croyons, de tout ce que nous devrions et pourrions faire ensemble.
Un très beau texte, un hymne à la vie, un message d'espoir par un grand écrivain qui nous aide à croire encore et toujours en l'avenir.
Ça va très vite. Vous faites durer le monde vingt minutes. Vous mettez les étoiles en bas. Vous téléphonez au hasard, buvez en pissant, épluchez une pomme dans votre tête. Vous faites l'animal, vous allez au cirque, vous inventez les titres de l'actualité. Vous passez dans un tableau, disparaissez à la terrasse d'un café. Vous ramez sur un lac chez vous, vous vous mettez à genoux pour réciter l'annuaire, vous partez à la recherche de la caresse infime. Chaque fois, de petites portes s'ouvrent dans la tête. Le jeu consiste en effet à provoquer de petits déclics, des impulsions minimales. Par des expériences à vivre. Au ras des choses, en jouant. C'est ainsi depuis qu'il y a des philosophes?: commencer à penser exige une pratique du décalage, du pas de côté, du changement d'optique.
« Confronter un scientifique et un philosophe sur les neurosciences, leurs résultats, leurs projets, leur capacité à soutenir un débat sur la morale, sur les normes, sur la paix, tel est l'objet de ce livre. Le débat d'idées est trop rare en France. Affirmations péremptoires, critiques unilatérales, discussions incompréhensibles, dérisions faciles ne cessent d'encombrer le terrain sans souci pour des arguments qui, avant d'être convaincants,aspirent à être tenus pour plausibles, c'est-à-dire dignes d'être plaidés. Vivre un dialogue totalement libre et ouvert entre un scientifique et un philosophe constitue une expérience exceptionnelle pour l'un comme pour l'autre. » (P. R. et J.-P. C.).
Voici un livre unique pour qui veut découvrir, comprendre ou approfondir la philosophie.
Il est constitué d'une série de leçons consacrées aux grandes questions philosophiques, que l'on pourra lire dans l'ordre que l'on voudra, selon ses goûts, ses besoins ou ses choix.
Ces leçons mobilisent les apports des philosophes les plus précieux, des classiques aux contemporains : Platon, Aristote, Descartes, Spinoza, Hegel ou Nietzsche, mais aussi Arendt, Rawls, Levinas, Foucault, Derrida ou Habermas.
L'ouvrage aborde également les débats les plus actuels : découvertes scientifiques, bioéthique, environnement, retour du religieux, bouleversements artistiques, mutations sociales et politiques... Chaque leçon dégage ainsi un bilan des contributions de la philosophie à l'état actuel de la réflexion.
Un avant-propos nourri fournit des fils conducteurs pour que le lecteur puisse s'orienter dans les questionnements philosophiques.
Une conclusion très ouverte s'interroge sur les avenirs possibles de la philosophie dans la culture contemporaine.
Pour qui se pique de philosophie, l'abeille est un sujet de choix. Aucun animal n'a davantage fasciné les hommes. Les penseurs de toutes les époques et de toutes les civilisations ont cherché dans la ruche les secrets de la nature et les mystères de la culture, comme si elle était le miroir idéal de l'humanité et le baromètre de son destin.
De l'Antiquité à la période contemporaine, c'est à une extraordinaire histoire de la culture occidentale que nous convie ce livre : en suivant le vol délicat de l'abeille, on rencontre le génie d'Aristote, l'avènement d'Auguste, la naissance du christianisme. On la retrouve à l'âge moderne accompagnant les premiers pas du retour des humanités antiques comme la découverte de la science expérimentale.
Aujourd'hui que les menaces de disparition de cet insecte passionnent le public, le symbole n'a pas fini de fonctionner.
Qu'est-ce qui fait de nous des hommes ? Le privilège d'être dotés d'une conscience ? Antonio R. Damasio propose une nouvelle théorie permettant d'expliquer en termes biologiques le sentiment même de soi. Non, la conscience de soi ne tombe pas du ciel. Oui, elle peut s'expliquer, presque se montrer, et nous pouvons la connaître. Nous savons enfin ce que nous sommes et pourquoi.
Trente ans après l'immense succès de Conversations sur l'invisible, voici Du nouveau dans l'invisible.
L'invisible a fait des progrès, il gagne chaque jour du terrain. Ce livre essaie d'en suivre les avancées. Où en sommes-nous ? Boson de Higgs, ondes gravitationnelles, exoplanètes (par milliards peut-être), énergie noire, plurivers, intelligence artificielle, nanotechnologies, conversations secrètes des robots : partout l'invisible se faufile et s'impose. Et nous devons admettre ce que nous ne pouvons ni voir ni entendre.
Et davantage encore : nous devons par moments renoncer à comprendre, renoncer même à savoir, nous débarrasser de notre raison vieillissante et admettre l'incertitude comme un privilège.
Et si quelquefois les spécialistes ne parviennent pas à dire ce qu'ils voient, et ce qu'ils ne voient pas, au moins nous pouvons partager cette brume avide de connaissance.
Comment vaincre la mélancolie historique qui nous assaille aujourd'hui?? Comment résister à la culture de la peur, éviter le découragement?? En choisissant de résister, en cultivant l'esprit critique de notre temps, nous dit Marc Crépon.
Après s'être interrogé sur les formes de la violence, le philosophe analyse ici le refus de la soumission et les formes qu'il revêt. Reprendre le contrôle de nos vies et leur donner un sens implique de résister.
Nourri de la philosophie des Lumières,??Marc Crépon en appelle à un esprit critique qui n'est ni l'indignation vaine ni la révolte convenue. Dans différents domaines de la vie sociale (la santé, l'école, la culture, le monde paysan), il plaide pour une politique des singularités qui s'oppose à une politique des identités, afin d'échapper aux pièges de l'appartenance et de la nostalgie du passé.
Notre avenir dépend de notre désir de résister.
«?Peut-on sortir de l'antisémitisme?? Et comment???» Cette question conduit Pierre-André Taguieff à s'interroger sur le philosémitisme, qui désigne originellement, dans les rapports entre chrétiens et Juifs, le passage du mépris hostile au respect et à l'estime. Dans ce nouveau livre, il procède à l'examen approfondi des stratégies et des positions marquées par la haine ou la défense (ou l'amour), parfois ambiguë, des Juifs, auxquels on reproche soit leur universalisme, soit leur communautarisme.
Ce livre examine les argumentations pro- et anti-juives développées par un ensemble d'auteurs et de figures publiques, du grand historien Michelet au journaliste Yann Moix. Il y est question des postures ambiguës des penseurs des Lumières, mais surtout de l'antisémitisme du XIXe siècle et du XXe sous toutes ses formes, ainsi que de l'antisionisme radical du XXIe. On croise des personnages aussi différents que Mirabeau, l'abbé Grégoire, Wagner, Nietzsche, Drumont, Zola, Renan, Bernard Lazare, Clemenceau, Barrès, Bloy, Bernanos, Blanchot, Gide, Maritain, plusieurs papes, Céline, Rebatet, Xavier Vallat, Alain, Sartre, Simone Weil, Arendt, etc., dont Taguieff analyse avec brio les positions souvent variables, ambivalentes ou contradictoires, non sans traquer aussi les faux-semblants.
Cet ouvrage fait oeuvre de salubrité publique. Il est précieux pour déchiffrer les nouvelles phraséologies des discours identitaires qui se plaisent à fantasmer l'ennemi, alimentant l'esprit du soupçon et aiguisant les tensions entre les groupes humains.
" Mon âme est un orchestre caché, écrivait le poète Fernando Pessoa.
Je ne me connais que comme symphonie. " D'où vient donc cette musique si particulière qui se joue en nous et nous accompagne à chaque moment ? D'où vient que nous soyons des êtres conscients, éprouvant toujours, dès que nous ouvrons les yeux et quoi que nous fassions, le sentiment inébranlable d'être toujours les mêmes ? Et quels sont, au tréfonds de nos cellules, les mécanismes qui permettent l'émergence de ce qu'il y a de plus humain en nous, nos sentiments, nos pensées, nos créations ? Antonio Damasio, l'un des spécialistes des neurosciences les plus importants et les plus originaux, lève ici le voile sur la fabrique de la conscience.
Au sein du cerveau, bien sûr, et qui plus est dans ses parties les plus profondes, si intimement liées au corps et à la régulation de la vie biologique. Non, la conscience et le soi ne sont pas une " chose ", une " substance ", une " entité " en nous, comme on l'a longtemps postulé. Bien au contraire, ils forment un ensemble dynamique de processus nés petit à petit au fil de l'évolution biologique. Pour autant, les " naturaliser " ainsi, est-ce rabaisser l'homme ? Sûrement pas, pour Antonio Damasio, tant on peut s'émerveiller de la mécanique rendant possible la symphonie dont, à chaque instant de notre vie, nous sommes le chef d'orchestre.
Une approche très originale, qui renouvelle en profondeur la science de la conscience.
Aron-Sartre, Foucault-Deleuze, Ricoeur-Derrida, Derrida-Lévinas...
D'où sont nées ces amitiés entre des philosophes qui ont marqué leur temps?? En quoi ces «?couples?» sont-ils absolument singuliers et que nous disent-ils de leur époque et de ses enjeux intellectuels??
«?Parce que c'était lui, parce que c'était moi?», écrivait Montaigne à propos de l'amitié qui le liait à La Boétie, s'exclamant également?: «?O mes amis, il n'y a nul amy?!?» S'appuyant sur leurs correspondances, des écrits peu connus, des récits de témoins, François Dosse lève le voile sur l'intimité de ces relations marquées par une proximité affective qui n'exclut pas jalousies et rivalités, rancoeurs et haines recuites. L'intensité des joutes le dispute au caractère spectaculaire des réconciliations, parfois à titre posthume.
À travers ces itinéraires croisés, c'est toute la seconde partie du xxe siècle qui nous est restituée, avec ses controverses, ses déchirures, ses explosions sociales...
Comprendre quelle est notre place dans le vivant, comment nous en procédons et comment nous en émergeons : tel est l'enjeu de ce livre qui retrace la généalogie du monde humain où, contrairement à une certaine idéologie libérale, la notion même d'individu n'a pas de sens, car chacun est d'emblée saisi par un réseau de relations.
« On ne descend pas deux fois dans le même fleuve », disait Héraclite le ténébreux. Car tout s'écoule en un flux permanent : l'eau, les vivants, le temps... C'est le début du cheminement philosophique auquel nous convie Anne Fagot-Largeault. Le devenir paraît impensable dès l'origine de la philosophie. Ce qui devient ne cesse de changer : comment connaître ce qui n'est ni stable ni régulier ? Comment constituer une science du vivant si tout est en mouvement, les individus comme les espèces ? » Sous la plume d'Anne Fagot-Largeault, des thèmes classiques - l'être et le devenir, le temps, le vivant, l'évolution, l'individu - sont revisités avec une maîtrise qui les rend simples. Elle organise un dialogue passionnant avec et entre les auteurs, anciens et modernes, scientifiques et philosophes, condense en quelques citations lumineusement expliquées des argumentations complexes.
L'analyse englobe les sciences, jusqu'à l'astrophysique contemporaine : l'Univers aussi est en devenir. En fin de parcours, bien sûr, c'est de l'homme qu'il est question. Par la science et par l'action, il change la marche des processus naturels, et la question
Le temps : quoi de plus familier ? quoi de plus insaisissable ?
Daniel Sibony en donne dans ce livre des aperçus pénétrants. Il est question du temps complexe et rationalisé de la physique ou de la métaphysique, abordées sans lourdeur, mais non sans payer son tribut au mystère.
Il est question aussi du temps de la mémoire et de la nostalgie, cet « effort pour remonter le désir épuisé vers les lieux d'autrefois où il était plein de lui-même ; comme des poissons remontent le flux vers des lieux où se reproduire ».
Au fil des pages, Daniel Sibony dit la place qu'occupe le temps dans nos vies : chacun est concerné, entre le désir de « prendre son temps », la crainte d'être « pris » par le temps et l'angoisse de vieillir.
Le propos est riche des multiples ressources de l'auteur : mathématicien, physicien, théologien, psychanalyste exposant des cas très parlants. Avec un art consommé du verbe, il exploite en virtuose la façon propre qu'a le langage d'ensemencer et d'éclairer la réflexion.
Rien d'étonnant si, dans sa préface, le grand mathématicien Alain Connes invite à lui prêter « la plus grande attention ».
Que notre monde soit cerné par le malheur n'empêche pas la beauté d'y être présente à profusion. À nous de l'accueillir quand elle s'offre et d'aller à sa recherche quand elle se cache.
Intime satisfaction - mais aussi nécessité - de l'esprit et du coeur, elle habite et imprègne les lieux les plus divers : ceux, célébrés, des arts ou des paysages. Mais bien au-delà la découvre-t-on au détour d'une idée ; dans le choix d'un mot par Flaubert ou d'un coup d'archet par Yo-Yo Ma ; dans le sauvetage du Santo António comme dans la trajectoire d'un ballon de football ; dans l'agenouillement d'un Willy Brandt, les dernières paroles d'une Sophie Scholl ou l'héroïsme d'un Jacques Stosskopf ; dans la chose éducative de Jules Ferry, la vérité d'un théorème et l'éclat d'un minéral ; ou sur le visage de la belle inconnue d'Ekaterinbourg.
Innombrables ceux qui nous font le don de la beauté, Antigone, Euclide, Richier, Mozart... mais aussi Andrei Sakharov ou Jeanne Villepreux. Et sans limite son espace.
Cheminant au long des millénaires côte à côte avec le Sapiens, émanant de lui, et retournant à lui, elle l'aide, selon le mot de Malraux, « à rejoindre une transcendance et à se tenir droit ».
D'où viennent nos stratégies de pensée?? Pourquoi est-on curieux, pourquoi ne veut-on rien savoir, pourquoi a-t-on l'impression d'avoir raison là où on a tort?? Penser par soi-même suppose de savoir ce que l'on sait ou ne sait pas, de choisir entre les arguments valides et les faux-semblants. Mais comment faisons-nous le tri, dans le feu des urgences?? Spontanément, avant toute réflexion, telle affirmation nous paraît plausible, telle autre indubitable.
Ce livre montre que la décision comporte une part émotionnelle qui dicte ce qu'il faut approfondir ou négliger, qui discerne si nous pouvons nous rappeler un nom, résoudre un problème, gagner une partie d'échecs. Mais elle peut être socialement manipulée?: encourager nos réactions spontanées, réduire nos capacités critiques, étouffer celles de nos enfants. Comment résister au déferlement de la pensée impulsive??
En sachant de quoi elle est faite.
Joëlle Proust expose ici le compromis que l'évolution de la pensée et de la cognition nous pousse à négocier à tout instant entre penser vite et penser bien. Elle propose de nouvelles pistes pour aider chacun à éduquer sa capacité de raisonnement, donner aux enfants l'envie d'apprendre, permettre aux agents collectifs de parvenir aux décisions les plus informées, et comprendre pourquoi la postvérité en séduit plus d'un.
La raison, dit-on, est ce qui rend les humains supérieurs aux autres animaux. Si elle est un tel atout, pourquoi n'a-t-elle évolué que dans notre espèce?? Pourquoi nos opinions et nos actions sont-elles si souvent irrationnelles??
Hugo Mercier et Dan Sperber s'attaquent à ces énigmes. S'appuyant sur des exemples historiques, des anecdotes du quotidien et les derniers résultats de la psychologie expérimentale, ils critiquent l'idée selon laquelle la fonction de la raison serait de permettre à chacun de parvenir à une meilleure connaissance du monde et à des décisions plus justes. Pour eux, la raison est avant tout à usage social?: elle nous aide à nous justifier aux yeux d'autrui, à argumenter pour convaincre et à évaluer les arguments des autres. Elle facilite la communication, les actions collectives et la vie sociale. Elle peut aussi polariser les antagonismes.
En bref, la raison a pour fonction première de permettre aux humains de tirer le meilleur parti de leurs inter- actions, riches et complexes. Cette conception explique comment la raison a pu évoluer, et ce qu'on peut - ou non - en attendre.
Ambitieux, provocateur, passionnant, ce livre donne aux lecteurs des ressources pour penser leur propre façon de penser.
L'humanité est-elle prête à vivre avec d'autres intelligences ? Dans ce livre, Pascal Picq analyse la coévolution de l'espèce humaine et de ses proches - les australopithèques d'hier comme les chimpanzés d'aujourd'hui - avec les innovations techniques et culturelles actuelles. Retraçant les fondements des intelligences animales, humaines et artificielles dans une approche évolutionniste, il nous explique comment elles ont émergé, en quoi elles diffèrent fondamentalement et pourquoi certaines d'entre elles sont plus performantes que d'autres.
Une nouvelle phase de l'évolution se dessine en ce moment, dont il est urgent de prendre la mesure : il nous faut apprendre, et vite, à vivre en bonne intelligence avec toutes ces intelligences. En attendant les promesses du transhumanisme, une décennie de tous les possibles s'ouvre à nous. Les technologies ne suffiront pas si l'humanité ne s'inscrit pas dans une véritable vision évolutionniste qui associe les intelligences humaines, animales et artificielles.
« Nous avons besoin aujourd'hui d'un humanisme vital.
Et cela nous ramène à la «valeur» de l'humain qui est la condition de tout humanisme et sur laquelle on s'est beaucoup trompé.
Car cette «valeur» n'est pas une propriété simple qui excepterait l'humain du vivant ou qui pourrait être écrasée par lui. Elle réside plutôt dans des inventions humaines, réponses toujours perfectibles à tous les dangers vitaux à la fois. Ainsi, cet humanisme est vital non seulement parce qu'il situe l'humain dans le vivant, mais parce qu'il le considère comme nécessaire et urgent, pour la vie de tous les vivants.
L'humanisme suppose encore autre chose : un accès universel à tous les humains. Or, ici, nous partageons bien quelque chose mais n'est-ce pas d'abord une inquiétude ? Oui, en effet. C'est même ce qui m'a poussé à vous écrire. Mais je savais, dès que je m'y suis engagé, que cela nous permettrait aussi de rejoindre nos joies. » F. W.
Dans ces lettres adressées à une amie « inquiète et qui sait penser », Frédéric Worms explique pourquoi l'humanisme vital est la réponse philosophique aux dangers de notre temps.
Les avancées de la biologie contemporaine posent de façon nouvelle des problèmes philosophiques anciens, tels que ceux des rapports entre le vivant et l'inanimé, entre le corps et l'esprit, l'erreur et la vérité.
La philosophie de Spinoza, bien que datant du XVIIe siècle, apporte à ces problèmes des solutions plus pertinentes que la plupart des philosophies plus récentes, développées dans les siècles qui l'ont suivie.
En retour, les acquis actuels des sciences physiques et biologiques, notamment des neurosciences cognitives, permettent de porter un nouveau regard sur certaines notions propres à la philosophie de Spinoza, telles que sa « petite physique », la nature cause de soi, la notion de matière, l'essence des choses, les genres de connaissance, qui acquièrent de ce fait un surcroît d'actualité.
Une approche tout à fait nouvelle de la philosophie, et de Spinoza en particulier, grâce à la biologie et aux sciences cognitives.
Dieu, qui a changé la vie des hommes et leur mort, a lui-même changé de vie, depuis sa naissance, il y a trois mille ans. De visage et de sens. L'appellation d'origine demeure, mais l'être baptisé de différentes façons, n'a pas les mêmes caractères en l'an -500, +400 et +2001, que l'on soit à Jérusalem, Constantinople, Rome ou Boston. Le Dieu de punition et de Toute-Puissance des Hébreux n'est pas le Dieu de consolation et d'intimité du chrétien qui n'est pas l'Énergie cosmique impersonnelle du New Age. Notre propos : dégager à nouveaux frais les péripéties d'une genèse, les bifurcations d'un itinéraire et les coûts de la survie. Comment ? En scrutant le terre-à-terre du Ciel. En reculant les projecteurs de l'avant-scène vers les coulisses et les machineries de la production divine ; en remontant de la Loi aux tables du même nom, tel l'idiot auquel le sage chinois montre la Lune et qui regarde son doigt. Et dans quel but ? Pour éclairer l'une par l'autre l'histoire de l'Éternel et celle de l'Occident. Zones d'ombre incluses. Et pour nous éclairer nous-mêmes. Régis Debray est professeur de philosophie à l'université de Lyon-III et président du conseil scientifique de l'École nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques.
Faire découvrir en Montaigne un penseur de la vie en société, de ses contraintes et de ses libertés : telle est l'ambition, originale et audacieuse, de l'ouvrage de Philippe Desan.
Les Essais ne se résument pas à un récit de soi, d'où l'appartenance sociale aurait été totalement effacée. Le moi de Montaigne est un moi en société. Et le but des Essais est de penser le rapport entre l'existence singulière et le social, l'individuel et le collectif.
C'est donc à la sociologie bien plus qu'à la psychologie qu'il nous faut avoir recours pour comprendre l'oeuvre de Montaigne. Les grands thèmes de sa pensée, scepticisme et curiosité, relativisme culturel et civilité, se trouvent dès lors éclairés d'un jour nouveau, qui leur confère toute leur portée sociale et historique.
On découvre un Montaigne inattendu, loin de l'image du sage réfugié en sa bibliothèque, coupé du monde et de la vie en société. C'est à une leçon inédite de sociologie que l'on assiste alors, capable d'articuler ensemble individu et société, dans un monde de conflits et de violences où l'idéal d'honnêteté toutefois n'est pas totalement oublié